BECKETT (Samuel)

En attendant Godot (édition originale avec envoi) et archive Samuel Beckett provenant de la bibliothèque de Maurice Nadeau

Formidable archive constituée de :

L’édition originale d’En attendant Godot, avec envoi autographe signé daté d’octobre 1952 ;

21 livres en édition originale avec envoi autographe signé à Maurice Nadeau, comprenant ses deux autres principales pièces de théâtre Fin de partie et Oh les beaux jours et, entre autres, L’InnommableComment c’estWatt (originale française) et Compagnie (originale française) ;

- Correspondance de 14 lettres : 4 lettres autographes signées, 6 lettres signées et 4 cartes autographes signées (dont une adressée à Geneviève Serreau, collaboratrice de Nadeau aux Lettres nouvelles) envoyées du début des années 50 à 1986, rendant compte des relations entretenues durant plus de trente ans par l'écrivain et le critique, directeur de revue et éditeur. Y sont évoqués les textes et extraits de ses œuvres, donnés en avant-première aux Lettres Nouvelles puis à la Quinzaine littéraire.

- 14 livres dont l'édition originale française de Murphy (couverture Bordas) et les éditions originales de Molloy et Malone meurt.

Les principaux livres, tous brochés tels que parus, et la correspondance adressée par Samuel Beckett à Maurice Nadeau, sont conservés dans 26 chemises en demi-veau blanc cassé sous étuis bleus rappelant les couleurs des éditions de Minuit.

A notre connaissance, aucun ensemble de Samuel Beckett aussi conséquent (par son importance, son ampleur, sa durée et sa provenance) n’a été présenté sur le marché à ce jour.

Rappelons par ailleurs que la bibliothèque personnelle de Jérôme et Annette Lindon a été léguée à la Bibliothèque Nationale de France en 2015.

A la suite d’une recommandation de Tristan Tzara, Maurice Nadeau entreprit à sa sortie en 1951 la lecture de Molloy, roman d’un écrivain irlandais alors inconnu. « C’est le coup de foudre. Et je publie dans Combat, le premier article [En avant vers nulle part, 12 avril 1951] qui paraîtra dans la presse sur ce singulier Irlandais » confiera-t-il dans Grâces leur soient rendues (Albin Michel, 1990).

Nadeau rencontre Beckett pour la première fois à l’automne 1951 à la demande du romancier. Celui-ci lui confie alors avoir écrit une pièce de théâtre à deux personnages, il s’agit d’En attendant Godot.

Trois mois plus tard, Roger Blin monte des extraits de la pièce pour la radio et demande à Maurice Nadeau de préparer un texte de présentation de Samuel Beckett et de sa pièce.

C’est à cette occasion, le 17 février 1952, soit sept mois avant la publication du livre par les Éditions de Minuit et presqu’un an avant la création de la pièce au Théâtre Babylone, que Maurice Nadeau donnera sur les ondes le tout premier compte rendu d’En attendant Godot :

« La pièce dont vous allez entendre quelques scènes a été écrite par Samuel Beckett en 1948-1949. [...]. Vous y verrez deux curieux amis, Vladimir et Estragon, perdus dans une campagne insolite au bord d’une route près d’un arbre, dans l’attente d’un rendez-vous improbable. Ils attendent Godot sans savoir qui est Godot, ce qu’ils lui veulent et ce qu’en retour il veut d’eux. Ils sont là depuis des jours, des semaines, des années peut-être. Ils devront attendre Godot des jours, des semaines ou peut-être des années. Hors cela ils ne savent rien, ni même qui ils sont ni où ils se trouvent. Que pourraient-ils faire d’autre que de tuer le temps, se raconter des histoires auxquelles ils ne croient pas, parler pour ne rien dire.

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? » demande Estragon à Vladimir. L’autre répond « si on se pendait ». Et comme ils n’ont pas plus envie de se pendre que de vivre ou de s’en aller ils restent là et attendent, appliqués à ne pas penser afin de ne pas compliquer inutilement la situation.

Une diversion leur est offerte par le passage d’un homme Pozzo, tenant en laisse, et de façon à ce que la corde lui écorche bien le cou, un autre homme Lucky, son serviteur, son esclave, son objet. Il prend plaisir à le maltraiter odieusement sous les yeux de nos deux amis. Vont-ils s’indigner, appeler à la rescousse morale, droit, humanité ? Ils comprennent trop bien que ces deux-là ont trouvé, eux aussi, le moyen de se donner l’impression d’exister. Qu’ils sont l’un et l’autre heureux à leur manière, c’est-à-dire parfaitement désespérés.

Le lendemain ou quelques années plus tard, le couple repasse. Pozzo tient toujours Lucky en laisse mais il est devenu aveugle. Lequel dépend de l’autre, qui est le maître et qui l’esclave ?

En attendant Godot ne lève aucune des perplexités que suscitent en nous le spectacle du monde, le sentiment de notre propre vie. Elle les accumule au contraire et les approfondit dans un climat de haute farce qui est celui de la vraie tragédie.

En l'écoutant vous penserez à Kafka, à Shakespeare, à Alfred Jarry. Vous ferez la connaissance de Samuel Beckett qui n’est peut-être rien d’autre que la part ignorée de vous-même. » (Maurice Nadeau, Texte de présentation de Samuel Beckett et d’En attendant Godot, 17 février 1952, archives de l’INA).

Description détaillée en cliquant sur ce lien :

Archive Samuel Beckett