DEUX (Fred)

Correspondance adressée à Marthe et Maurice Nadeau

Circa janvier 1967 au 23 juillet 1970

13 LAS et 10 LS

Correspondance, composée de 13 lettres autographes signées et 10 lettres signées, adressée à Marthe et Maurice Nadeau, l’éditeur des trois romans de Fred Deux, publiés sous le nom de plume Jean Douassot par Julliard dans la collection des Lettres nouvelles, dont son chef-d’oeuvre, La Gana, édité en 1959.

La correspondance couvre la période s’écoulant de janvier 1967 à juillet 1970, certaines lettres étant non datées.

Il y est question de l’activité artistique de Fred Deux, de son exposition à la Galerie Petit en 1967 et de ses relations avec le galeriste Visat, et le couple Brache.

Il est également longument question de l’activité littéraire de Fred Deux, sous son nom de plume Jean Douassot durant cette période. Y sont évoqués l’action en justice à l’encontre de l’auteur pour outrage aux moeurs suite à la publication de la traduction italienne de La Gana, de Sens inverse et La Perruque, les deux ouvrages suivants publiés par Maurice Nadeau chez Julliard dans la collection « Lettres nouvelles » en 1960 et 1969 et surtout de Nœud Coulant publié par Eric Losfeld en 1971.

Retranscription :

LAS 1 (2 pp. in-8), s.d. [circa janvier 1967]: « Jeudi / Chers Marthe et Maurice, Avant que je n’oublie, Ivanof, de nouveau fatiguée, est arrivée au sana du Dr Periot (interdépartemental). C’est lui qui nous l’a appris et Cécile [Reims] lui a téléphoné. la semaine prochaine elle viendra casser la graine ici. (A tout hasard voici son adresse : Ivanof Jacqueline «Petite soeur Salmée Jacqueline» sanatorium interdépartemental Hauteville 01). Demain, vendredi, Visat débarque ici, pour m’acheter des dessins, et en embarquer un petit tas en vue de la préparation d’une exposition qu’il envisage en 67 chez [François] Petit, là ou Bellmer exposa en décembre. Une semaine après ce sera les Brache [Pierre Brache et Geneviève Bonnefoi]. Courant février, une galerie de Genève, contactée par Visat, viendra à Lacoux «voir» mes trucs muches, et peut-être sortira-t-il une exposition de ça. P’têtre.
Ça fait - brusquement - un petit ouragan les chats n’en croiront pas leurs yeux.
Mais j’aurais dû vous demander comment ça gazer, les amis ? Hier j’ai eu le n° de la Nef sur la littérature. Oui ! Non. Et bien j’ai vu que M. N. ne démordait pas d’un truc don j’ai démordu depuis quelques temps. Alors je me demande ce qu’il (Mauco) ressentira à la lecture de - La Place du mort - texte manuscrit qu’il a, de mon grand pote Alien. Est-ce que tu l’as lu ? Le Alien en question envisage de faire un texte sur mes dessins. Non pas en une page, mais un petit paquet. Pour l’instant j’ai vraiment, si tu as le temps, envie de lire une lettre de toi vieux renard, me disant si tu mets Aliens dans une poubelle, aux chiottes, ou sous tes fesses. Ah ah. Le moral n’est pas mauvais. C’est mauvais signe. Il va falloir que je reçoive un coup sur la gueule pour me réorienter. Salut les chefs. Je vous bécotte (sic). Fredoc ».

LAS 2 (2 pp., in-8), s.d. [début 1967]: « Jeudi. Cher Maurice, Il y a 2 ans… (qu’est-ce que c’est que ce commencement de lettre..) tu étais d’accord pour préfacer une exposition à Lausanne (Expo qui n’eut pas lieu). Alors comme je t’annonce que le 6 avril (et pour 10 jours seulement) 50 dessins de Bibi-Lolo seront exposés chez Petit, acceptes-tu de préfacer cette exposition-là ? – C’est Visat qui a embrayé Petit. – C’est Geneviève qui fera un papier dans le N. O. [Nouvel Observateur]. – ce serait toi qui présenterait l’expo. Tu as vu les dessins que les Brache ont acheté (sic). Geneviève m’a dit que tu avais trouvé ça, pas mal.. Les dessins à exposer seront choisis par Visat et Geneviève, samedi. Tu pourrais voir ce choix et faire ton papier. En bref, si tu refuses, je n’en serai pas vexé. (pas du tout) tu as assez de boulot comme ça. Geneviève pense, en plus du catalogue où figurerait le texte, publier (ronéo) un petit CV de ce que j’ai fait, et d’en profiter pour recoller les deux noms Douassot-Deux. Dans ton texte il ne serait donc pas utile de s’étaler sur ce point – peut-être. Bon – réfléchis – et dis-moi ce que tu as décidé. Et téléphone un coup à Geneviève. Comment allez-vous ? Ici ça gaze. Je bosse et je vous embrasse. Fredoche ».

LS 1 (2 pp. in-4) datée du 3 février 1967 : « Cher Maurice, Je m’excuse de te bombarder de lettres… Encore une, mais qui concerne la Ganache. En effet, je reçois une lettre d’Italie, émanant de Milan, et m’informant que je suis inculpé pour « publication obscène » ! Donc, en relation directe avec la saisie de la ganache italienne. J’écris à Mlle Rives (tout en me demandant si elle est toujours chez Julliard. Mais si tu as dû te trouver (ou plus précisément des auteurs..) dans des circonstances analogues. Qu’est-ce qu’on branle ? Inculpé ça veut dire quoi ? Et dois-je faire une lettre, ou laisser choir, etc.. Je m’excuse mais je vois cette connerie avec rigolade, Cécile pas du tout. Qui a raison des deux ? Basta… Reçu ta lettre démolissant le texte d’Alien. (!) Et je n’en rajoute pas davantage car je te fais perdre ton temps, mais tout de même, tu es cassant. Merci. Demain arrive[nt] Geneviève et son mari. Je me demande si tu as reçu ma dernière lettre annonçant la visite de Visat, car un des camions de la poste a fait un saut dans un ravin, et les bafouilles se trouvant dans la bagnole sont pleines de boue ! En tout cas, sache que Visat m’a embarqué 70 dessins, casqué un petit tas de fric, et que le reste suivra, ça me met à l’aise pour 67 si tout continue sur cette lancée. Mais sait-on jamais. Tchao, je vous embrasse. Fredo. 3/2/67. PS : Je dois me présenter devant le xème session du Tribunal de Milano le 20 février 67, signore ! ».

On joint une lettre autographe (accompagnée du double de la mise au propre tapuscrite) de Maurice Nadeau au Président du Tribunal de Milan, datée du 17 février 1967, expliquant qu’il a édité la Gana en 1958 aux éditions Julliard, récit qui « n’a fait l’objet d’aucunes poursuites en France » et qu’il a suscité des chroniques favorables, y compris dans la revue catholique Esprit qui le qualifiait de « révélation ». Il ajoute que la Gana a fait l’objet de nombreuses traductions, n’ayant donné lieu à aucune poursuite et que partout la Gana a été considéré comme une œuvre littéraire et artistique de premier plan. Il conclue en demandant à son interlocuteur d’éviter un scandale en abandonnant les poursuites à l’encontre de Jean Douassot.
On joint également une letter tapuscrite de Anne Rives, datée du 7 février 1967, à ce propos.

LAS 3 (2 pp. in-8) : « Vendredi, Cher Maurice, Encore merci de m’avoir téléphoné. J’ai posté (à Lerici [éditeur milanais de la traduction italienne de La Gana] et au Tribunal Milan) 2 lettres recommandées. Et à l’intérieur des phrases se dissimulait mal ma colère. J’ai demandé à Lerici s’ils acceptaient, lui et son avocat, de plaider pour Bibi par la même occas. - ce qui reduirait ma note. Je dois avoir un peu de pèze en Italie. Faudrait que je lui demande mais j’ose pas. Reçu au courrier du soir une lettre d’A. Rives qui me demandait de signaler à Lerici que Julliard et M. Nadeau pouvaient - s’il le voulait - lui faire parvenir des lettres de dépositions en ma faveur. Pour l’instant basta. Bande de connards !. Hier en fin de soirée, fin du dernier acte de la pièce que jouait la putain (boutique) devant Cécile? Coût : 400 000 balles ! Les caisses sont vides. Sa banque tire l’échelle. Tous les artistes et artisans créateurs comme nous, qui lui ont fourni fin 66 de leurs travaux et qui tous escomptaient être casqués, l’ont dans l’os. Le fond n’est pas à elle, rien ne lui appartient, etc... Bref dans l’cul la balayette. Robert (le copain avoué) va essayer de faire soit déclarer une faillite (qui n’avance à rien) ou voir autre chose. A ce niveau, on brûle les meubles !. Troisième petit truc. J’espérai qu’à leur retour, Geneviève (lundi ou mardi) te téléphonerait pour te rassurer en ce qui concernait ta lettre (Alien) que tu as cru que je lui avais envoyée ! Samedi je n’arrivais pas à me réchauffer (ta seconde bafouille étant un bloc de glace). Je vois que tu n’as pas su ce que j’avais demandé à Geneviève de te dire. J’avais plus que brièvement retourné ta lettre à Alien en lui disant en très peu de mots, que son texte était impubliable (qu’il était le xème à tenter, en échouant, d’exprimer et de sortir ce qu’il avait fait, mais qu’il devait s’y remettre). Voila. Quant à la visite de G. Elle et son mari étaient emballés. Une lettre arrivée hier renouvellait (sic) sa satisfaction. J’espère qu’elle te téléphonera pour, de vive voix, te dire ce qu’elle pense de ce qu’ici, ils ont vu.
Sérieusement : venir ici passer 3 jours, c’est facile. Vous prenez (Marthe et toi) le dur à la Gare de Lyon (18h30) arrivée à Bourg en Bresse à 22h30., et de là avec ma 3 CV on part pour Lacoux où l’on est à 23h15. On a le samedi pour soi - et le dimanche à 16h30, retour sur Paris où l’on arrive à 21h40 - gare de Lyon. Alors ? C’est du gâteau. Allez. Hop. Oui ? Quand ? On vous embrasse. Fredo. PS J’ai donc donné à Mme Visat votre téléphone pour qu’elle parle à Marthe ».

LAS 4 (2 pp., in-8) datée du samedi [12 février 1967]: « Cher Maurice, Samedi, nous terminions notre déjeuner avec Ivanof venue passer l’après-midi, quand ta lettre au Président est arrivée. Évidemment… comment te remercier ? Et d’ailleurs il s’agit moins d’ébranler un Président (inébranlable étant président) que de fixer les points délimitant les propriétés de chacun. Avec ta lettre, c’est clairement exprimé.
Retour en arrière : le 26 juin 50, je quittais l’hôpital de la Timone à Marseille, convaincu de quitter les Présidents et leur Cie en montant dans le train. Depuis je ne me suis plus occupé d’eux. Mais j’avais une idée fixe, cauchemard (sic) éveillé : brusquement le train s’arrêtait, on cherchait quelqu’un, on me trouvait, me jugeait, me condamnait et sur place, on m’exécutait. C’est, en gros, ce que l’Italien voudrait faire ! Depuis, l’idée fixe a trouvé sa place dans mon armoire à ustensiles et elle y dort, d’un œil seulement. On verra bien. Pour le moment je dessine, et tout se squeletise (sic) calmement. En tout cas ta lettre par-balles avec ses mots-boucliers, a été soigneusement rangée. Si un jour je perds la parole et « tout sens de la dignité humaine » elle me sera utile pour qu’au moins on me foute la paix. Merci chef. Et ici, je te la sers et du fond du cœur je t’envoie ma brûlante amitié, Fred Deux ».

LAS 5 (2 pp., in-8) : « dimanche, Cher Maurice, Merci. Ta lettre, extrêmement claire m’a (c’est déjà ça) éclairé violemment le texte d’Alien. Personnellement j’avais été très sensible aux cris. Le reste (la polémique) m’était difficile à juger car je n’ai pas lu les auteurs dont Alien juge ou attaque les textes, mais le ton ne m’avait pas échappé. De plus, Alien – qui t’estime beaucoup – voulait ton avis. Là, il l’a. Comme on le verra bientôt, il lira entièrement ta lettre. Je suis certain qu’elle va lui être très utile. Merci encore. Deuxième chapitre. Visite de Visat durant trois jours (il est parti à midi, aujourd’hui sur Paris). Visite très bonne, résultat plus que positif. Il m’a embarqué un nombre énorme de dessins (10 années de travail, avec un choix que je trouve judicieux) et m’a laissé un paquet de fric « intéressant » ! Visat – éditeur imprimeur – aimerait te rencontrer. Il veut parler avec toi une question personnelle. Il recherche certains textes, à illustrer (mais « grand » luxe, puisque « grands » illustrateurs (Matta, Ernst, Bellmer, forment sa brochette de tête, d’autres suivent aussi[)]. Si tu es d’accord en mars – (à notre voyage) on vous fera vous rencontrer, non. Autre question. Madame Visat a des problèmes au point de vue enseignement en ce qui concerne une de leur[s] fille[s] et – peut-être Marthe pourrait-elle lui être de grand conseil. Nous n’avons pas osé donner votre téléphone mais si Marthe et d’accord pour la renseigner (comme c’est assez urgent) Madame Visat pourrait lui téléphoner et éventuellement rencontrer Marthe. Madame Visat est si timide qu’elle voit le moment approcher de faire quelque chose, mais ne connaissant on ayant pas d’amis enseignants, elle est un peu plus qu’inquiète. Si c’est faisable, que Mme Visat expose à Marthe son problème elle approchera du même coup de la solution (administrative je crois). Ici moral excellent. Ça fait drôle de voir partir des dizaines de dessins d’un coup ! Et chez vous – le moral est bon ? La lettre de Maurice est une preuve de sa grande forme. Tchaô. Je vous embrasse (et merci pour la réponse). Fredoche ».

LAS 6 (2 pp. in-8), lundi : « Lundi / Cher Maurice, Encore une lettre de moi ! Merde. Oui, je sais. Floc - au bouillon - comment va ? Ici on bosse. Alien - qui malgré ses 1m90 - n’ira pas chercher lui-même son texte, me demande de lui faire suivre le chemin inverse de l’aller. Donc retour ici, et départ chez lui. C’est plus compliqué, mais comme ça, son mort prend l’air. Il m’a dit t’avoir téléphoné ! C’est un évènement ! Il voulait en savoir davantage. En tout cas il veut le retravailler, et je suis content de ça. La preuve est qu’il n’en reste pas là. J’ai toujours peur qu’un gars se décourage. Même s’il mesure 1m 90 (ou surtout). Est)-ce que tu peux faire venir le mort ici ? Merci d’avance, et excuses.
Je me dis que tu pourrais bien voir - si tu en as envie - les 70 dessins que Visat a ramené ! C’est faisable. Tu verrais là-bas, ce qu’en 65-67 j’ai branlé. Peut-être que ça te tiendrait lieu de recalcifiant moral. Car je dois te dire que tout est, curieusement embringué. C’est par période. D’un côté ça gaze mais alors ailleurs faut que ça craque. On lit le [?] sur les indiens, c’est [?]. Se bouffer entre homme, quel plaisir ! Je m’imagine bouffant du Pape. Vieux bébé cadenassé et glaireux. On prend son plaisir où... Tchao et à bientôt (fin mars on vient) ou vous, avant, ici un week-end ? Fredoc ».

LS 2 (2 pp. in-4) : « Chers amis. On ne devrait pas rester aussi longtemps sans s’écrire ! Et pourtant.. Je voulais le faire après le passage ici, de Gilles qui – Cécile l’a dit au téléphone à Marthe lorsqu’elle était à Paris dernièrement – nous a réellement touché. Touché parce qu’il a en deux jours, et en discutant avec lui, montré un aspect que nécessairement nous ignorions puisque nous ne l’avions jamais eu sous la main et qu’aussi il est très jeune encore. De lui, l’image d’un adolescent secret et tout à coup ici, la lumière sur lui, en lui, ce qui est préférable à tout. Donc, très bonne impression.
Que fait-il actuellement ?
Il y a Claire, mais c’est pareil : il faudra qu’on la découvre aussi, mais il y a peu de chance pour qu’on puisse la voir ici un jour.
Et vous ?
Nous suivons, de loin, le travail de Maurice. Et nous recevons consciencieusement ses publications. Vu le coup de chapeau que C. Gallimard lui a lancé dans son interview concernant Le Cléziot (sic) (j’ai lu Fièvre de lui, et je trouve ça très bon). Mais à part ça : comment va ?
On vient d’être secoué par l’affaire israélo-arabe. Pas marrant. On connaît assez bien le problème car nous avons des amis israéliens qui sentaient venir le coup, et qui ne partagent pas du tout les prises de position de leur gouvernement mais qui n’acceptent pas d’être traités comme des chiures. On finira peut-être par là où il fallait commencer c’est-à-dire discuter dans le fond, du vrai problème qui est aussi un problème d’option du côté des Israéliens car il est hélas évident que ceux qui voulaient faire en Israël un travail vraiment socialiste, sont déçus. Mais les histoires de ce genre sont énormes et embrouillées. Je crois encore à une possibilité d’un revirement des deux côtés. Mais quel nettoyage à faire. Dire qu’on peut encore parler d’une guerre sainte à notre époque !
Je pense qu’en ce qui concerne le papier signer (sic) (que j’ai retourné aux L.N.) au sujet du génocide au Vietnam, vous attendez que se calment les bruits de guerre au Moyen-Orient, pour lancer le coup. Il faut le faire en temps voulu, mais malgré les explosions de cette semaine, qui est ignoble, et ce qui se prépare au Pérou, au Venezuela etc.. des écrabouillements très réussis et l’usage de la signature, qui se fait de plus en plus mal comme par un énervement collectif, doit être ramené à sa valeur réelle, et engageant gravement les signataires sur un problème grave. Ce qui est le cas au Vietnam plus qu’ailleurs. J’attends donc de lire et d’entendre que des intellectuels conséquents, à l’échelon international s’engagent à tenir leur parole qui est d’aider et de soutenir moralement financièrement et physiquement par une prise de position qui soit en flèche, et dure. Bien sûr, selon les moyens personnels, chacun soutien, et financièrement d’ici, nous maintenons une aide à notre manière comme d’autres, mais cela finit par ne pas être assez car le silence nous maintient à l’écart. Où on est, en résumé, l’Appel ? Celui-ci au moins n’amènera pas les ordures à se mêler à nous, car quelle stupeur de voir dans une des récentes manifestations, en faveur d’Israël, des D. de Roux, des Sanguinetti, des Tomazo de Rotschild précéder ou suivre ceux qu’on peut appeler des « braves gens ». Personnellement, je ne veux pas me voir amalgamer, de force, à ces fumiers. L’appel aura ce privilège, d’être politiquement très engagé. Mais… je dois reconnaître une signature, 1000 signatures ne font pas le printemps dans le ciel politique… je sais.
Par Visat, nous avons appris que lentement, le projet d’une édition abordable, d’auteurs particulièrement importants allait voir le jour, et que l’on commencera par A. Artaud ? Bien. Visat, sous ses aspects bourrus, effacés, est un type que j’estime non pas parce qu’ils m’aide financièrement, et en plus de m’avoir fait exposer (puisqu’il faut bien exposer…) fait pour moi, un certain travail en profondeur. J’espère qu’une collaboration, même si elle reste étirée (combien peut-il sortir de livres de la sorte par an ?) s’établira entre vous. Il est l’ envers d’un prétentieux et se pliera volontier devant la connaissance et la compétence de Maurice. C’est ce qu’il veut. Il a l’intention de faire illustrer Artaud par un artiste, et il a pensé entre autres, à D. Tanning, ce qui n’est peut-être pas très approprié, mais là aussi il a besoin je crois de le savoir. G. Bonnefois, avec qui je suis en discussion sur un problème qui me concerne en propre, a je crois, une certaine position négative envers Visat, homme simple, et qu’elle juge d’une certaine hauteur, avec sa compétence, mais il faut savoir où celle-ci commence et où elle s’arrête pour chacun de nous. J’espère que ça marchera. Et que vous ferez quelque chose de bien.
Et nous ? Ben ma foi… hein.. Quoi qu’il en soit, je travaille et c’est très délirant, au plein sens du terme. La santé, on n’en parle pas aujourd’hui. Le moral ? ..Comme dit Borderie… à remuer de la merde on fini (sic) par en avoir plein la cervelle ! Je vous embrasse, et donnez des nouvelles bientôt.
P.S. Visat vient de nous annoncer sa visite pour samedi. Bravo à quant (sic) la vôtre ? Fredo ».

LAS 7 (2 pp. in-8) adressée à Marthe : « Mardi / Chère Marthe. Ça va ? Une lettre à toi pour te tenir au courant d’un fait qui t’intéresse je crois. Ivanoff (Petite sœur Salmé !) Qui est au sanatorium interdépartemental à Hauteville 01 (Tel : 270) va être opérée le 3 juillet. Ablation totale du poumon (gauche ou droit je ne sais plus) c’est la seule chose qui reste à faire d’après le toubib qu’on connaît. On la voir, ici, faut elle vient soit manger soit boire un thé, et je pense que si tu as pour elle un petit moment pour lui envoyer un mot, elle en sera – avant et après – contente. Son moral est bon. Elle est confiante – opération très grave. Il ne lui restera plus qu’un poumon, qui est propre dit-on l’autre est tout troué. Voilà. Nous la verrons ici avant l’opération encore. Elle se rattache je crois, un peu à nous c’est-à-dire aussi à toi. Elle est restée une fille bien, mais son problème m’échappe à partir du moment où elle parle de sa foi. Mais c’est rare et ses préoccupations sont bonnes étant au fond restée ce qu’humainement elle était, avant, dans l’autre voie. J’espère que ça va à la rue Malebranche. Et Maurice ? Ça boulonne et n’a pas un moment pour dire un brin si le moral est bon. On vous embrasse. Fredoche ».

LS 3 (1 pp. in-4), s.d. [circa automne 1967] : « Chers M. et M. / On croyait.. Que dalle, une carte mystérieuse, venant de Cuba mais dont les timbres (français) n’avait pas été oblitérés.. On s’apprêtait à vous poser des questions, à vous tripoter pour voir si sur votre peau, il y avait des traces de votre séjour cubain. Déjà dit : que dalle. Dans l’ensemble, vous avez l’air contents. Je pense depuis longtemps que là-bas il se passe quelque chose de pas piqué des vers. On na ve, merde, on ne va pas parler de ça ici. Sachez que notre côté, ça boum. On a fait un saut chez les Brache, et j’ai pu constater que son abbaye (fort belle) me casserait les membres si je devais vivre à côté d’elle. C’est un morceau, mais j’ai un mais sur la langue. Faut-il sauver ce genre de beau truc muche ? Est-ce bien le moment ? Mais je redis que c’est pas mal. Tout comme l’idée du futur musée-fondation. Mais qui ira voir ? Pas les prolos de toute façon. Personnellement, je serais passé à côté de ce beau groupe de bâtiments, sans savoir que c’était à des amis.. Qu’aurais-je pensé au-dedans de moi ? Après Cuba, quel effet ça vous fait en y repensant ? Nous y avons passé trois jours, et Albi m’a tapé dans l’œil. Mais, et surtout, le petit village où les B étaient avant de venir à Beaulieu : Najac, superbe. De quoi tuer toute la région tellement c’était cruel. Devaient porter des « masques », les gars qui perchaient là « avant ». En même temps qu’on vous espérait, je me disais que je vous montrerais peut-être bien, des dessins, dernière période, crayon simple, noir, sur papier Japon. Ce sera pour une autre fois. Je m’apprête à passer l’hiver avec le fol espoir de travailler encore plus profondément.
À la mesure de mes moyens. Ici, tchaô, à vous lire un jour, et bonne rentrée. Frédoche Cécile. Ivanoff va bien. Elle remarche normalement. »

LS 4 (2 pp. in-4), s.d. [circa automne 1967] : « Chers Marthe et Maurice, Bien sur, votre lettre a donné la température de votre satisfaction, et de la réussite de ce voyage à Cuba. Il est certain que non seulement à Cuba, mais en Amérique latine, les « castristes » font quelque chose ! et poursuivront leur but. Et devant eux, nous sommes des enfants, machinant leur tétine et faisant, le cul sur nos chaises, la fine bouche devant les « exaltés » révolutionnaires. Nous qui n’avons pas été capables de « faire » quelque chose. Mais il y a un point qui nous a retenu (dans ta lettre). Vous dites qu’avec 20 ans de moins nous seriez là-bas.. Mais (une question) n’a t-on pas toujours 20 ans de trop ? Et une autre question vient à l’esprit : pourquoi aller là-bas ? (s’il y a des lieux où nous devrions aller, peut-être en accord avec nos pensées, c’est au Vietnam du Nord, en premier, puis comme le disait Anne Philippe, en A. Latine) mais passons (je commence à me connaître, et à connaître les autres). Pourquoi aller là-bas alors qu’ici, et selon les possibilités de chacun, il y a à faire ? Que nous les soutenions moralement, financièrement, d’accord, et que certains se sentent particulièrement fait pour mener ailleurs qu’ici, une lutte révolutionnaire armée, je le comprends, mais ici, où tout est pourri, et vraiment au-dessous du tout, et où les artistes eux-mêmes sont des pachas les roulements à billes d’un char croulant sous le fric et la veulerie, pourquoi ne pas, à notre mesure, (non pas faire la révolution.. Ça me semble avec des navets, impossible) faire un commencement de travail. Car sans quoi, on se trouve dans la situation suivante : être d’accord avec les révolutionnaires x et y, mais sur notre propre sol, nous nous accommodons de ce contre quoi, x et y se sont et se battent encore et veulent tout faire pour éviter un retour à une telle merde. Je crois qu’on doit arriver à faire un brin de chemin qui ressemble à quelque chose comme un accord entre ce que nous pensons, défendons, et vivons. Comment ? C’est à voir, à discuter. Nous avons tous notre idée, pourquoi ne pas tenter l’embryonnage, à l’échelon infime, voué sans doute à l’échec, mais pas d’avance. Je pense surtout à un groupement, fait d’artistes qui refuseraient de se prêter au jeu puant où l’argent est roi, et qui accepteraient – ces artistes – de vivre conformément à leurs idées, dans leur chair. C’est aussi une manière d’être révolutionnaires. Fini, ce beau jeu subtil de l’intellectuel distant mais « disponible ». Il y a un truc à faire, quelque chose à prouver, hors de la merde. Faut y penser. Ou bien, ce que je fais à ma manière, c’est le retrait jusqu’à une certaine limite, évitant les contacts avec ce qui me débecte ; mais cela ne concerne que moi. Et je me mords la queue. Ce qui n’empêche pas la satisfaction qu’on en tire en ne pataugeant pas. Selon ses moyens.. bien sur ! En attendant, que je vous dise qu’on bosse, qu’on arrache peau après peau, de cet oignon qu’on appelle l’être, et que c’est bien long pour arriver à la dernière. Mais y a-t-il vraiment une dernière ? Très écoeuré par tout ce qui se passe ici et là. Ça pue la marmite. On ira (O foutaise..) mais avec, de ma part, aussi, une certaine émotion, en Lituanie en janvier 68, passer 10 jours là où Cécile a passé 10 ans de sa vie, histoire de voir comment c’est fait, ce pays de Keserling. Sinon j’en attends rien. Tchaô, on vous embrasse, et demain, on achètera la quinzaine, histoire de vous serrer la pince. Fredo ».

LAS 8 (2 pp. in-8) : « 30 juillet / Chère Marthe, cher Maurice, Je n’écris que pour vous dire qu’on est content de savoir que Marthe va mieux et j’espère que ça va continuer. Sans doute n’est-ce pas marrant d’avoir continuellement le frein sur la [pointe?] de la vie, mais je préfère le frein au pépin de l’imprudence. Je me doute que cette chaleur doit fatiguer un malade mais ce con de soleil, il est chouette par moment. Le gars de Chorus est passé à Lacoux hier. Son numéro s’organise. Il est très satisfait de savoir que tu as accepté et même si je te paie cher, je te remercie. Je mets une dernière main (moite) à un texte. Il va falloir que je t’envoie ça. (j’ai 2 manus. prêts) C’est une drôle de sensation physique que le moment de prendre la décision d’envoyer, ou de montrer des dessins ou un texte. De la tiédeur de l’atelier, de leur place un peu comme des larves ou des [?], on les mets au grand jour, et ils se mettent à marcher. On (moi en l’occurence) est tout bête, un peu ému, un peu tremblant, un peu hargneux. Dans Lacoux écrabouillé de soleil rien de neuf. (si ce n’est une colonie à 3 mètres de nous !) J’espère bien vous voir ici. Mais si ! Nous vous embrassons, Fredoche. Tu ne le sais peut-être pas mais j’ai écrit à C. Duits pour lui dire que son dernier bouquin (et le précédent) est excellent. J’ai envoyé une lettre à G. Sereau (sic) en lui demandant de faire suivre mais Geneviève n’est-elle pas en vacances depuis le 15 juillet ? ».

LAS 9 (2 pp. in-8) : « 30/8/69 Cher Maurice, Dommage que tu n’aies pas été à Pouligny. L’idée nous est venue d’aller vous voir alors que nous étions à Vendôme. Marthe avait l’air fatiguée. Je sais qu’elle relevait d’un malaise mais je ne crois pas l’avoir fatigué (1) supplémentairement. Tu manquais à la rencontre. Dis-moi, comment vas-tu, toi ? Encore un pot pour en dire plus. Je te sens emmousquaillé (sic) et c’est le moins que je puisse dire ! Je ne pense pas venir à Paris avant quelques mois. Que je te pose la question que j’aurais posée si je t’avais vu à Pouligny : Veux-tu lire mon Noeud coulant ? Actuellement j’ai ce texte prêt. L’Usure que je dois revoir un peu plus tard sera prête je pense dans quelques temps. De la traduction de la P. [La Perruque] par Mme [?] je ne sais qu’une chose elle l’a lit actuellement et lorsque Gerlach [traducteur allemand de La Gana] viendra ici en octobre, j’en saurai plus. Que faisons-nous à Lacoux ? Cécile qui ne tisse plus pour raison de santé - comme rien ne se présente côté gravure-nègre, va se remettre à un truc à elle. Moi je redessine après 4 mois d’arrêt. La santé est bonne. Le moral moyen. On attend des lettres d’amis...
(Je ne sais si tu partageras mon avis au sujet de Denoël concernant plus particulièrement la Perruque mais moi, je suis franchement mécontent. La Perruque est sur une voie de garage depuis sa parution. Quelque soient les articles ! Je me demande ce qu’il faut pour cette boîte fasse un petit chouilla de publicité ! Ces gens là oublient que les auteurs - sans attendre la fortune (tu me connais) ne crachent pas sur ce qui rentre. Un éditeur est un marchand et c’est en tant que tel qu’on le regarde. Peut-être trouveras-tu que j’ai tort de me cabrer mais la P. a, toute seule, obtenu autant de papelards que La Gana et S. I. [Sens inverse] réunis. Si c’était à refaire je ne signerais pas un contrat avec eux.)
Sur ce dernier paragraphe entre parenthèses j’aimerais savoir aussi ce que tu penses. Mais en tout cas j’espère avoir de tes nouvelles bientôt et par la même, en avoir de Marthe. De tout coeur vieux, nous vous souhaitons de retrouver un peu de calme dont vous avez tant besoin. On vous embrasse tous les deux. Fredo ».

LS 5 (1 p. in-4), datée du 8 décembre 69 : « Cher Maurice. Comme toujours à cette période de neige, je suis en plein boulot. Je vais de mes dessins à ma machine. Je n’ai pas terminé de retaper le Nœud Coulant (encore une centaine de pages). Mais ça va. C’est clair. Début 70 je crois pouvoir te l’envoyer si tu es d’accord. Je suis dans la Gana Losfeld. Très content de la voir ressortir naturellement. Il se posait un problème et je pense avoir résolu. Il reste que tu acceptes cette solution : l’article paru dans l’observateur du 6/11/58 pourrait parfaitement servir de préface car il entre dans le (sic) chair du livre et dès le 6 XI 58 je l’avais mis de côté. Je propose que la préface commence a (sic) partir du titre « Une horreur naturelle » et soit totalement respectée jusqu’au bout. Qu’en dis-tu ? En fait donc, je propose que le premier paragraphe soit supprimé parce qu’il n’est plus, à mon idée, actuel après la publication des autres livres. On a bon être dans la neige, on sait tout ce qui se passe ailleurs, et à Paris. Le Prix de la Critique pour ton Flaubert, que j’ai aimé d’emblée. FÉLICITATIONS. Ta démission du Renaudot, Félicitations aussi ! Parlons de vous. Comment va Marthe ? Est-ce que son histoire stabilise ? Peut-elle avoir une vie un peu plus libre ? Et toi ? Ton moral dans tout ça ? Malgré, ou à cause [de] cette grande activité (je suis resté des mois sans rien foutre), le mien (de moral) et en dents de scie. Ça doit tenir à un furoncle qui pousse quelque part mais que je n’arrive pas à voir. Est-il utile de le découvrir. Je me dis souvent : et après ? Mais les chats sont solides. Ça, ça vivra longtemps. Bouffer dormir, se gratter..
Je te laisse. Je n’arrive plus à écrire une lettre. Ça se sent. Je te serre la pince. Amitiés à Marthe. Fredo 8/12/69 ».

LS 6 (1 p. in-4) : « Le 12 Dec 1969 / Cher Maurice. Je suis content que tu acceptes ma proposition. C’est l’article le plus solide à mes yeux, paru sur la Gana en 58. Tu as l’air étonné que Cécile n’ait pas téléphone. En fait elle avait un « programme », mais il tourna court sur la fin. Elle sentait la grippe en elle, et les trois premiers jours, elle usina du côté de Losfeld et de Visat (qui sort 2 grandes gravures en couleurs mais avec lui, c’est toujours tordu). Elle s’était réservé le samedi et dimanche pour voir les amis. Elle était certaine de vous voir. Hélas Hong Kong veillait et samedi matin elle prenait le dur pour revenir se mettre au lit où elle est encore avec une bonne fièvre. Voilà, sans fioritures, les circonstances de son départ précipité. Rien d’autre. Tu me diras que cela n’empêchait pas un coup de fil. Comme elle savait que j’allais t’écrire, elle laissa tout en suspend (sic). Tu n’es pas le seul à avoir été étonné car d’autres amis nous écrivent pour demander des détails. Je pense venir a (sic) Paris en janvier à la parution de la G. Pour les détails que je demandais, je me suis arrondi (comment tu vas, et Marthe ?) J’espère que ce n’est pas un signe d’emmerdement. Je te serre la pince. Fredo ».

LAS 10 (1 pp. in-8) : « 27. XII. 69 / Chers Maurice et Marthe, Comment ça va ? Pas mal j’espère. en tout cas, commencez bien l’année 70 (70 ! déjà) (ou seulement). Bons voeux. Bon boulot et une santé résistante. Cette nuit je croisais Maurice qui avait des boîtes de médicaments à avaler ! Si j’en crois le dernier H. Michaux, c’est l’inversion du thème qui donnera la mesure. J’espère qu’il en est bien ainsi. Ça bosse. Losfeld doit passer ici dans un jour ou deux - dit-il. Bien amicalement et bonne année. Fredo ».

LS 7 (1 p. in-4), s.d. : « Cher Maurice. Tu vas dire que c’est lorsque j’ai rêvé de toi que je t’écris. Mais c’est encore une fois vrai. J’ai rêvé que tu étais sur une pente de montagne, avec de la boue, et des pinceaux dans une main. Tu mâchonnais une phrase que j’eus beaucoup de mal à comprendre. Enfin je crois avoir retenu ce que tu disais : j’ai éclaté là-haut, c’était gras.
Peux-tu me dire ce qui a éclaté ? Et si c’est possible, pourquoi (et qu’est-ce qu’il était) c’était gras.
Comment ça va, à part cet éclatement ? Et Marthe ? Je t’avais promis Nœud Coulant. J’avais à y un travailler. Tout est prêt. Comme je comptais venir à Paris à la sortie de la Gana (quinze jours après sa sortie pour être précis), ça devait tomber fin janvier. Donc je devais venir avec mon texte. Puis la date était reculée. Je pense tout de même que le mieux est de venir dans un mois avec mon tas de feuilles. Mais si tu veux l’avoir avant, dis-le (sic).
Ici ça va. Cécile travaille (la croute). Moi je dessine. J’ai relu l’Usure (mon machin en route). Tout est à refaire. Nœud coulant l’a été quatre fois et maintenant, c’est définitif, c’est ça ou le feu. Ah, je suis très loin de me mettre à la machine et à taper 500 feuilles qui sont toutes chaudes et dans l’impossibilité de porter une virgule. Curieux phénomène (si l’on veut), mais le dessin suit exactement la même trace. Un dessin n’est jamais fini, et celui qui suit le précédent et – au départ – la phrase suivante qui manquait. Et comme d’autres signes surgissent, il morfle.. etc. En fait, je sais de moins en moins ce que je veux faire, et de plus en plus je « vois » ce que je fais. Ça donne de plus en plus de surprises. Ce rythme sans me convenir me pousse dans le dos. Ça revient à regarder son dégueulis. J’y prends peu de plaisir mais je ne reste pas indifférent à ce qui sort. Curieux tout ce que le dedans peut contenir. Autre chose qu’un cerne au dessous des yeux. J’ai reçu J. Berger, Serreau, et Hemery. Merci. J’ai lu le Berger. Je trouve ça très mauvais. Pourquoi ? Que Berger parle de la contrainte en URSS, d’accord, mais qu’il veule faire partager ce qu’il dit de ce sculpteur : je ne marche pas car si ici, un type faisait ce qu’il fait (du Zadkine, et encore ! .. à en juger par les reproductions) personne ne voudrait risquer le ridicule de défendre un tel art d’expression.
Je m’entends. On est loin de ça maintenant. Ou alors, il faut le classer dans la catégorie « art d’un moment » qui est voué à être avalé, digéré, et foutu sur toutes les places pour abrutir les gars. C’est définitivement terminé ce chapitre. J’ai très bien compris ce que Berger voulait dire et je ne comprends pas pourquoi les conards (sic) soviétiques refusent l’audience à cet artiste car à mes yeux il est le produit, «à la lisière », que peut enfanter un système comme on sait qu’il est là-bas. Ce qu’il fait (humour mis à part) et justement expressionniste, saisissant, dans l’immédiat, et à mes yeux vulgaire (pas dans le sens collet-monté) mais dans le sens vulgarisation d’une part, des « formes », et vulgaire parce qu’il est encore attaché à la forme alors que c’est ce qui est en dedans qui depuis des années fascinent certains artistes. Le contenant est mort. C’est le contenu, qui explose chez certains (dont je veux faire partie) qui a encore a (sic) dire. Bref, pas d’accord du tout avec Berger. Je vais lire Serreau et Hemery. Pour le livre d’Hemery j’ai jeté un coup d’œil, et ça m’a tout de suite accroché. Je lis en ce moment les lettres [d’] d’Antonin Artaud à Génica. On n’en parlera si tu veux. Bon. Chef, en t’espérant en assez bonne forme, je te quitte. Amitiés à tous les deux. Fredo ».

LAS 11 (1 pp. in-8) à propos du Noeud coulant, qui sera publié par Eric Losfeld en 1971 : « Samedi, Cher Maurice J’ai reçu ta lettre. Merci vieux. C’est avec un réel plaisir que nous avons lu que Marthe allait mieux. Dommage bien sur que tu sois arrivé 1/2 heure après notre départ. Nous ne sommes pas restés plus auprès de Marthe car nous la fatiguions. T’en fais pas. On se reverra encore. Pour Denoël je lui pisse au cul. (...!) Pour le Noeud coulant - qui n’a rien à voir avec une chaude-lance - je dois retaper un paquet de feuilles. Au moment de te l’envoyer, j’ai voulu relire une dernière fois et j’ai encore corrigé ! Donc, retard de 2 semaines environ. Excuse-moi. On vous embrasse. Fredo ».

LAS 12 (2 pp. in-4), s.d. : « Cher Maurice, en moins de deux semaines, 3 lettres ! La première qui te demandait si je pouvais t’envoyer Noeud Coulant. La seconde pour te dire que j’y apportais quelques corrections. La troisième aujourd’hui pour t’annoncer que je revois tout ! Donc tout sera à retaper. Voilà trois fois que ça m’arrive avec ce texte.
Il ne sert à rien que je m’étale – j’ai mes raisons – mais comme tu n’auras ce manuscrit que dans x mois je crois (j’en ai bien pour 2 à 3 mois) et que tu te disais impatient ! Alors patiente encore un peu.
Assez parlé de mes merdes. Et les tiennes ?
Des deux bouquins reçus (La Répudiation et La Pose du ?) C’est le premier qui m’intéresse malgré une gêne au plaisir que trouve l’auteur à utiliser toute la gamme de couleurs et le sens de la langue française. Cette restriction (légère) ne vient en aucun moment freiner ce que j’ai ressenti en le lisant. L’autre est à la mode (d’après moi) et si il est arrangé dans les Proustiens ou Prousteurs, c’est qu’il n’est pas encore tout à fait lui-même. Je viens de lire le Rigodon et Céline même à la fin, dans une certaine (et évidente) misère intérieure reste ce qu’il a toujours été, un des grands types. Celui qui a su (ou qui ne savait pas) descendre. C’est réconfortant qu’on parle moins de lui, que tout le monde soit gêné. Ce même monde l’été aussi avec Artaud. J’oublie de plus en plus son fameux choix (39-44) pour voir que personne ne peut le réclamer, le tirer à soi. Il a emmerdé, et Jusqu’à la littérature, et c’est bien une de ses qualités supérieures. Je n’ai pas cessé de me demander comment il avait pu faire une erreur aussi gigantesque entre 40 et 44 en écrivant ses de petites saloperies. Je n’y vois aucune erreur grave ! Paradoxe ! Il ne devait pas choisir. (À travers Rigodon et Château j’essaie de trouver une autre réponse, mais rien). Les types de gauche sont emmerdés avec lui et ceux de droite aussi. Je dis bravo ! Mais je reste sur une sale impression. Tout ça m’a ramené à penser à Miller. Quoi qu’il ait écrit, (et je ne me fais pas la fine bouche sur les Tropiques) il a joué sur du velours !
Si à 78 ans il peut encore être ce qu’il est, les bras m’en tombent, non pas admiration mais de dégoût ! J’ai toujours pensé qu’un homme comme je conçois celui qui crée, doit nécessairement aller vers le rétrécissement, l’agonie n’étant que la vraie liberté enfin conquise. Je ne suis pas vache envers Miller mais il ne reste de lui (pour moi) que ce qu’il a écrit à une époque, en se salissant pour vivre, en se détruisant pour survivre. Tout ce qui suit (et qui est bon à lire !) n’est qu’une sorte de resquille, de sursis froid et moite. Il n’empêche que je lui souhaite de devenir centenaire en le plaignant. Je m’aperçois chaque année davantage que s’il n’y a pas de règle du jeu, et encore moins de loi d’écriture, tout devient brisant dès qu’on veut aligner deux mots à la suite. C’est juste pour certains. J’ai des noms aux lèvres et que tu connais, mais si l’on ne brûle pas en consumant quelque chose, qu’est-ce que ce feu qui n’aurait pas de fumée ?
Je vais essayer de deviner un peu. Pour trouver un autre déséquilibre. Je suis en sale con. Un sale coup pour moi. Je ne peux plus rien faire sans détruire ce que je viens de terminer. Sans utiliser une hache. Je me console en me disant que je finirai bien par toucher l’artère un jour.
Dis-moi ça va Marthe ?
Ici c’est l’automne.
Je vous embrasse Fredo ».

LS 8 (1 p. in-4) : « Vendredi 24/4/70 Cher Maurice. Comment ça va ? Marthe, toi, le boulot ? Et de mon côté ? Ça va. Boulot : dessins. Borderie était ici il y a une dizaine de jours. On a fait un entretien et tu dois avoir un exemplaire du découpage qu’il a fait sur deux heures et demie qu’il a pompé. Borderie me dit que si je veux changer un mot ici ou là, je te le signale. Au cas où tu passerais cet entretien, voilà ce que je veux : Page 4, dans le bas, il y a : « je préparais une véritable fiche signalétique, mais plus j’avançais et plus l’enchevêtrement devenait inextricable. »
Suit une phrase : « je revoyais très bien mon entrée dans un préventorium et je m’en souvenais comme d’une entrée dans un camps de la mort ; je m’arrêtais là-dessus en me disant que j’étais en train de noircir ; et alors je me souvenais qu’à vingt et un ans, j’étais passé par un camp de concentration ».
Ce passage est à retirer.
Et après… devenez inexplicable. Je craignais de tout mélanger et j’ai commencé à prendre des notes..etc
En effet c’est un passage beaucoup plus long pour l’entretien, et ici, ainsi coupé, ça vient mal et je donne impression de mélanger préven avec camp (ce qui est faux) et l’allusion à mon passage dans un camp, donne à penser que j’ai été en camp, alors que j’ai VU, en combattant en Allemagne, un camp de concentration. Merci d’avance pour la coupure.
Reste une question, tu t’en doutes. As-tu lu mon texte ? Si oui, quand dis-tu ? Ici, on sort péniblement de la neige, mais c’est une protection pour moi : un isolement vrai. Car avec les beaux jours vont revenir les bruits, les cris, etc..
Les chats vont bien. Et les vôtres ? Avec toute mon amitié, Fredoche ».

LS 9 (1 p. in-4) : « Le 2 juin 1970 / Cher Maurice. Si tout va bien (nous irons en voiture), nous nous verrons à Beaulieu le 20. Ton silence doit être expliqué. Depuis trois mois tu as le N.C.. Il y a un mois, Cécile, en coup de vent à Paris, t’as parlé au téléphone. Ce que je sais depuis, c’est que tu trouves que dans le NC tu vois des coupures nécessaires. Pourquoi ne pas m’écrire. Certe (sic), (et sans que je me cabre) je ne suis pas prêt à couper dans ce texte comme dans les autres. J’ai – peut-être – tord (sic). De plus je n’ai pas oublié qu’en te donnant ce texte, je t’ai dis (sic) que je voulais surtout ton avis sur lui, car je n’étais pas très décidé à le donner à Denoël. C’est vrai. Mais en ami, ne peux-tu pas m’écrire, me parler de ce texte et des coupures si tu veux. Je sais que je « bloque » le système en refusant de couper. Mais encore faudrait-il que je sache. Je ne pense pas qu’à Beaulieu nous puissions parler. Le renvoi de mon manuscrit ne doit pas te poser de problème. Pas entre nous. Comment ça va de ton côté ? Et Marthe ? Ici, ça va. Je travaille beaucoup. Du dessin. Un autre texte est en chantier. Je me partage. Curieuse de période. Très énervé en ce moment. Stephen va bien, mais Pompon a disparu et je commence à voir la réalité en face. C’est con. J’espère te lire bientôt ; amitiés a (sic) tous les deux, Fred ».

LAS 13 (4 pp. in-4) : « Mercredi 9 juin 70 / Cher Maurice, je vais tâcher de répondre à ta lettre. Si j’arrive à m’expliquer – non pour défendre mon bout de gras – ce sera long. Essayons. A travers tes pages je vois l’inconfort du critique à sonder les reins d’un type. Il y a comme une claque que gonflent les spécialistes et qui devient « leur » choses, parfois en dehors du gars. Le critique se place de chez lui et c’est déjà tout un problème. Il y a aussi entre nous une amitié qui gêne l’autopsie.
Dans la Gana il y avait de la naïveté. « L’enfant se réfugiait dans les rêves et l’imaginaire parce qu’il était trop faible pour faire front aux problèmes ». On est donc dans le « fond » et restons y. Il s’agissait d’un univers particulier. Le lecteur était dépaysé ? Pas d’accord. (Tu soulevais déjà la question de savoir si ce torrent ne charrierait par que des pépites ?). Style ?
Tu me dis : on me raconte pas seulement sa vie pour se défouler mais pour exorciser ses fantasmes, ses obsessions et, finalement, la revivre sur un autre plan. Jamais je n’ai voulu donner à penser que je n’écrivais que pour me défouler ! Je n’ai pas pris l’écriture comme un remède, me libérant de mon mal. Fantasmes, obsessions ça va secouer une course, en fait délire tout court, tel est bien le tissu de ma vie. Ici le style n’a pas d’intérêt. L’autobiographie ne sert pas à montrer qu’on est exceptionnel (aux autres). Je ne vis (sic) pas au jour le jour ma vie. Je ne la vies (sic) qu’en la faisant revivre. Refusant le style je veux réapproprier ma vie. C’est ce manque d’analyse des événements qui m’entraîne toujours. Revus après un temps. Seuls les fantasmes me permettent de les rapporter vers la surface, une surface de de mots. Je dénude sans soucis de défoulement. C’est un amoncellement misérable. J’ai bien dit : misérable. En près de 20 ans de travail j’ai la certitude que la photographie ne reconstitue qu’un chemin, mais de chaque côté, le plan persiste. L’anecdote est peut-être une apparence.
Dans le Noeud coulant c’est exact. J’y ai mis le plus de moi-même. Pas dans l’espoir de paraître exceptionnel ou intéressant. Mais cette période m’apparaît comme la charnière, comme le la de ma démarche d’homme à venir. L’enfant de la Gana est plus un homme imaginant son enfance (avec la pâtisserie de mots, durs, mous, fades ou forts) mais rien ne semble possible, quand on referme le livre. (on est dans l’incapacité de tracer le profil du futur petit Alfred). Les fantasmes et surtout les rêves sont ratés. (beaucoup le pensent aussi). Car je n’ai pas, au fond, su choisir de l’homme qui se raconte ou de l’enfant qui en lui, reviendrait pour raconter.
Dans la Perruque j’ai esquissé un profil mais, aux prises avec les événements extérieurs (l’exode le ligote à lui donnant l’apparence d’une libération) : le profil est intracé.
Dans le N.C. c’est la racine que j’essaie de regarder. Loin d’être ou d’avoir voulu donner l’impression d’être passif devant les événements, c’est le commencement d’une folle quête vers un absolu où les contrastes le pincent et le secouent. Alfred, entre 15 ans et 22 ans entrevoit pas à pas, ses failles, ses gouffres. Ceux dans lesquels je vais plonger en homme. Il ne subit pas seulement. Il se débat. Il est parfois réduit à jouer la carte des autres. Puis la sienne.
Le fils de l’autobiographie ne devait pas être brisé. Ou bien alors c’est que je voudrais faire de ma vie une œuvre. Si un Céline plaide, sans le dire, pour l’humanité tout entière, si les événements extérieurs sont secrétés par lui et le modèlent, c’est – chez Alfred – dans les événements parfois extérieurs qu’il trouve (en voyant le piège) sa propre orientation. Vers ou contre, peu importe, c’est son profil qu’Alfred cherche. Il ne sait pas qu’il mettra – un jour lointain encore – sa propre machine en route en une sorte de réappropriation dépossédante. Ce profil ne me fascine que dans la mesure où il doit devenir de plus en plus fidèle au profil intérieur.
On quitte ici toute revendication tournée vers le dehors pour enfoncer ses mains d’aveugle au fond de son sac à peau.
La prise aux tripes de l’usine, la cavalcade sur les routes, les me[n]surations, ou le coussin chaud des cuisses de Blanche ne sont que des puits forés vers le dedans. Reste à savoir si cela se sent. Mais le style – ou l’absence de style – importe peu. Je veux utiliser et recoller les morceaux à moi. La question de savoir où tout cela m’a, en fait, mené (après S. Inverse) c’est précisément ce que dans l’Usure je mets au clair, mais il faut vivre encore.
Une phrase de toi m’a fait sauter : « … que tu reprennes dans une seule page tes phrases une à une, que tu les retournes et retournes … que tu passes sur une page d’écriture autant de temps que pour un dessin ».
Mes dessins sont exactement l’envers d’une pareille question. Ils s’opèrent par entassement, par enchevêtrement souvent incongrus et, de perte en perte, à faire en sorte qu’à l’intérieur j’y entende de « la ».
Dans ce que j’écris, les événements ne sont pas plus fascinants que ceux des autres. Mais c’est l’empreinte de Fred Deux ou Fred Trois qu’à travers eux je veux rattraper. Je cavale beaucoup. Jamais peut-être que je ne réussirai à poser ma main sur mon épaule. Je me débauche aujourd’hui comme au temps où je collais à la roue de casquette.
Une vieille querelle se retrouve posée. Savoir si un cri moulé dans un style est plus recevable littérairement, qu’un hoquet crié échappant aux repères stylistiques. L’articulation. Non pas pour moi. Est-ce que je donne l’impression de vouloir avoir raison ? Mais peut-être ai-je complètement tort. Encore une fois il ne s’agit pas de ça. Pas d’un bout de gras.
Tu dis : tu refais du Fredy. (encore un pastiche ? Mais de quoi, de qui ?).
Dis-tu qu’il s’agit d’une question primordiale d’homme, et que c’est en tant que tel qu’en 1959 je suis venu vers toi à travers le manuscrit envoyé à l’époque. Pas en écrivain. Qu’une certaine littérature qui prend de plus en plus de l’importance me donne envie de vomir car elle refuse d’atteindre l’os. Elle ne s’articule, celle-là, qu’autour d’un système pourrissant et sans odeur. Je me demande si l’hémorragie ne te, on ne vous, fait pas peur. Si vous ne voulez pas ignorer ceci : qu’écrire ne serait pour moi (comme dessiner) qu’une succession de garots (sic) posés et défaits. Un délire de soi. On touche dans un champ délimité, une frontière. Le système que tu utilises ne permet qu’illusoirement peut-être, de se glisser sur le terrain puant. Pas question de refaire le monde, d’exposer sa gueule.
Je ne crois pas que nous puissions espérer parler de tout ça à Beaulieu. Depuis longtemps une réelle correspondance aurait dû s’établir entre nous. Ça n’a jamais été fait. Chacun garde ses cartes et je crains que ça ne puisse se faire à présent.
Je ne voudrais pas donner l’impression d’être blessé parce qu’incompris. Il d’autre chose ici. Loin de moi l’idée de penser que tu es dans l’erreur. De ton point de vu (sic) tu as nécessairement en raison. Mais n’es-tu pas ligoté alors ? (1) Veux-tu me renvoyer bientôt le N.C. s’il te plaît. À bientôt à Beaulieu, Bien amicalement, Fred.
(1)    Je te pose une question que je voulais te poser depuis longtemps : n’es tu pas, par « moments », envahi par un doute ? ».

LS 10 (1 p. in-4) : « Le 23/7/70 / Cher Maurice. J’ai laissé passer le temps depuis ta dernière lettre. Tu me posais une question et je dois y répondre : l’amitié entre nous n’est pas morte. Le refus d’un texte ne pourra jamais entraîner une rupture ! Comment peux-tu penser cela. Mais que nous divergions sur le fond d’un problème très précis, c’est vrai. Faut-il en reparler ? Tu disais dans ta lettre que tu penses qu’un travail reste nécessaire dans l’écriture. Je suis le premier à le penser et, à ma manière, à le faire. Seulement et différemment de toi, je pense que ce travail n’est pas ériger en règle absolue. Qu’il doit se mêler au fond, le plus totalement, empêchant de discerner ce qui est le squelette et le corps. Peut-être (pour revenir au N.C.) ai-je raté le but. Peut-être. On verra. Certes ce n’est pas par exemple le livre de J. Pommier qui me fera bouger sur mon refus devant une telle littérature totalement plate (et son entretien m’a semblé d’une minceur affligeante). De plus, un Monsieur qui se réfère à des « valeurs », ne m’intéresse pas. Je me méfie plus que jamais, au point de ne pouvoir vivre que sur une aiguille, de la « phrase », cette mère sans odeurs et sans poids. Pour m’amuser, je pourrais faire la liste de ce que je vomis, mais l’intérêt serait mince. Cette littérature se compromet. Ce n’est pas toi ici qui est attaqué. Ce sont ces « précieux », ces mélomane de l’âme aux mots sucés et dénoyautés. Nulle misère ensuite, mais un foulard néglige[mme]nt noué autour du cou qui gonfle (je l’espère) d’une encore grosse colère. Vous devez vous apprêter à partir chez vous, dans la maison. Alors bonnes vacances, bon repos, bonne détente. Amicalement, Fred ».

4 000 €