MALLARMÉ (Stéphane)

Les Poésies

Paris, La Revue Indépendante, 1887

In-folio, demi-maroquin bleu-nuit à grain long et à coins, dos lisse, 9 fascicules, couv. sur papier Japon conservées réunies en fin de volume portant les titres : Premiers poèmes, Le Parnasse satirique, Le Premier parnasse contemporain, Autres poèmes, Hérodiade, L'Après midi d'un faune, Toast funèbre, Prose [pour des Esseintes] et Derniers sonnets, texte photolithographié, frontispice de Félicien Rops (reliure de l'époque), étui moderne.

Rare et importante première édition du premier recueil poétique de Mallarmé illustré d'une composition originale de Félicien Rops en frontispice, gravure connue comme La Grande lyre tirée en héliogravure après reprise au vernis mou par Rops.

Tirage unique à 47 exemplaires sur Japon impérial, dont 7 hors commerce, celui-ci portant le n°10.

Le texte photolithographié reproduit 35 poèmes autographes, dont 13 paraissent ici pour la première fois.

En effet, L'Après-midi d'un faune avait fait l'objet d'une publication préalable en 1876 chez Derenne et sept poèmes avaient été publiés par Verlaine dans Les Poètes maudits (1884), d'autres poèmes avait été publiés en revue dans L'Artiste (1862), Le Parnasse contemporain (1866 et 1869), Le Parnasse satyrique (1878), Lutèce (1883), La Revue critique (1884), La Revue indépendante (1885), La Vogue (1886), etc..

Très précieux envoi autographe signé de Mallarmé sous forme d'un quatrain octosyllabique :

Mes vers joyeux dans tout ceci

De briller par l'or de ta rente,

Ô Rodolphe Darzens merci,

Te proclament un des Quarante.

Stéphane Mallarmé

Ces vers ont été reproduits dans Vers de circonstances (Nouvelle Revue Française, 1920). Cependant la note relative à ce quatrain figurant dans la Pléiade (Tome I, p. 1291) indique que l’original du poème est inconnu et que « le clin d’œil académique aux Quarante pourrait faire penser qu’il agit de la dédicace des Poésies de 1887, tirées à 40 exemplaires ». Le doute est maintenant levé.

On ne connaît que très peu d'exemplaires dédicacés des Poésies de 1887 ; les deux derniers passés en vente, celui des Dames (Marie son épouse et Geneviève sa fille), non signé, ne comportait que trois mots autographes de la main du maître : "de ces Dames" (De la bibliothèque de Stéphane Mallarmé, 15 octobre 2015 n°123), celui de Méry Laurent, non signé également, portait sur la couverture de chacun des neuf fascicules un vers autographe formant un long et beau poème en l'honneur de sa maîtresse (Bibliothèque de Pierre Bergé, 11 décembre 2015, n°102).

Personnage protéiforme, à la fois poète symboliste, fondateur de revue, secrétaire au Théâtre Libre d'André Antoine, revendeur de bicyclettes d'occasion, coureur automobile, duelliste, traducteur d'Ibsen et de Strindberg, moniteur de boxe, Rodolphe Darzens fut l'un des tous premiers à s'intéresser à l'oeuvre d'Arthur Rimbaud rassemblant ses poèmes éparpillés et recueillant des informations de première main permettant de commencer à reconstituer le parcours du poète maudit. Genonceaux qui le premier édita en volume la poésie en vers de Rimbaud ouvrit son Reliquaire (1891) par une préface inachevée de Rodolphe Darzens. Celui-ci n'ayant pu en relire les épreuves fit saisir l'édition et supprimer la préface. Darzens rédigera ensuite une étude consacrée à "l'homme aux semelles de vent" qu'il ne put publier par suite d'une opposition de la famille du poète. Elle restera inédite jusqu'en 1998 date à laquelle elle fut reproduite par Jean-Jacques Lefrère dans Les Saisons littéraires de Rodolphe Darzens (Fayard).

Habitué de la première heure des mardis de la rue de Rome, il reçut des mains de Mallarmé un exemplaire de son premier grand livre, Le Corbeau traduit de Poe, publié par Richard Lesclide en 1875 et admirablement illustré de zincographies de Manet, ainsi dédicacé : "Aux encans où l'or aime braire, / Le prodigue Darzens a beau / S'exténuer comme un libraire / Je lui signe, moi, ce Corbeau".

Ami et amateur fervent de l'oeuvre de Villiers de l'Isle-Adam, il publiera le 25 mai 1890, dans la Revue d'aujourd'hui, la conférence donnée par Mallarmé en l'honneur de l'auteur d'Axël disparu un an plus tôt.

Quelques taches habilement effacées.

Très belle provenance.

Prix sur demande