L’AVIS DU LIBRAIRE

 

Avec envoi à son frère adoré, noceur invétéré

KESSEL (Joseph)

Avec les alcooliques anonymes

Paris, Gallimard, Coll. "L'Air du temps", 1960

In-12 (20,8 x 14 cm), broché, couverture à rabats, 361 pp., 5 ff. n. ch.

Édition originale (pas de grand papier).

Exemplaire du SP (avec poinçons en quatrième de couverture et aux 6 derniers feuillets).

Très bel envoi autographe signé de l'auteur, rédigé en anglais, à son frère cadet : "Old brother Georges / for the record / as you say / and love / Jef".

Bel exemplaire.

Exceptionnelle provenance que celle de Georges Kessel (1904-1970), vers lequel Joseph Kessel (1898-1979) reporta tout l'affection dont il débordait après le suicide de son autre frère, Lazare dit Lola, survenu en 1920.

Durant toute sa vie, Joseph Kessel apporta à Georges un indéfectible soutien, tant financier qu'affectif. 

Joseph et Georges Kessel partagèrent les mêmes addictions : les femmes, les cartes, la drogue et l'alcool. 

Aux dires de Jean Cocteau, les deux frères étaient "joueurs et noceurs dans le sang" et "Georges encore plus que Jef".

C'est dire si la dédicace ici proposée dut faire vibrer une corde sensible.

Les anecdotes et péripéties qui les lient sont innombrables : le "Dobri Tchass Zbogom" prononcé en 1918 au départ Joseph pour son long périple à travers le monde, l'accident de voiture survenu en août 1931 qui faillit leur coûter la vie, le séjour aux USA au frais de la MGM en 1936, la visite à Hollywood en novembre 1943 où Georges s'était exilé, le voyage en Inde en 1967 que Joseph poursuivit seul en Afghanistan...

De nature nonchalante, Georges, fut placé par son frère comme secrétaire particulier de Gaston Gallimard dans les années 1920. Il mena ensuite une carrière de journaliste, grâce au soutien sans failles de Joseph, prenant la direction du journal Détective puis des périodiques Voilà et Confessions.

Parti se réfugier aux USA durant la guerre, Georges vécut un temps en dilettante à Hollywood, ce qui explique l'emploi de l'anglais dans la dédicace lui étant adressée.

Joseph, par sa générosité, dût à maintes reprises combler ses fréquentes dettes de jeu. Prévenant, Joseph lui légua en 1933 tous ses manuscrits et y adjoindra tout ce qui vient de sa mère et ses droits d'auteur portés à son compte chez Gallimard en 1960. Ce dernier n'en jouira pas car parti plus tôt que son aîné, mais c'est l'intention qui importe.

Georges apparaît dans l'oeuvre de Kessel sous les traits de Daniel dans La Fontaine Médicis, premier volet de Le Tour du malheur, retraçant les épisodes de sa jeunesse, ainsi que dans L'Affaire Bernan second volume de la tétralogie.

Joseph Kessel lui dédia son roman La Rose de Java en 1937 et la nouvelle édition, parue en 1968, de L'Équipage.

Bref, Georges est omniprésent pour Joseph, dans son coeur comme dans son œuvre.